Plainte des descendants des victimes nigériennes de la Mission coloniale française en Afrique centrale : Un début de réponse au bout de 4 ans d’attente
Se basant sur une lettre de la représentation permanente de la France auprès des Nations Unies, le Journal britannique ‘’ The Guardian’’, dans un article publié le mardi 15 juillet 2025, rapporte que la France se dit prête à engager des discussions sur le versement de réparations pour les crimes commis durant la période coloniale au Niger, bien que l’ancienne puissance coloniale n’ait pas encore reconnu sa responsabilité. Le Journal précise que ladite lettre constitue une réponse à une demande adressée en avril par un rapporteur spécial de l’ONU, suite à une plainte déposée par quatre (4) communautés nigériennes représentant les descendants des victimes de la Mission française en Afrique centrale (MAC) de 1899.

Selon la même source, la lettre des autorités françaises mentionne également que l’ancienne puissance coloniale reste ouverte au dialogue bilatéral avec les autorités nigériennes, ainsi qu’à toute coopération concernant la recherche sur l’origine des biens culturels et du patrimoine. « Il est établi que pour constater une violation du droit international et engager la responsabilité d’un État, la norme juridique applicable doit être en vigueur au moment [des faits] », indique ladite lettre.
Des excuses publiques au menu des exigences
Rappelons que depuis juillet 2021, le rapporteur spécial des Nations unies pour la promotion de la vérité, de la justice, de la réparation et des garanties de non-répétition, Fabian Salvioli, a présenté à New York, un rapport intitulé « Mesures de justice transitionnelle et approches à adopter face au legs des violations graves des droits humains et du droit international humanitaire commises dans les contextes coloniaux ». Ce rapport a largement évoqué l’ampleur des crimes iniques résultants de l’invasion coloniale du territoire nigérien. Dans le même mois, des représentants des communautés nigériennes concernées par la question se sont exprimés aux côtés de Fabian Salvioli lors d’un webinaire intitulé « Racial Violence and Colonial Accountabilities ».

A cette occasion, les représentants des communautés victimes ont exigé des excuses publiques de la France ainsi qu’une enquête exhaustive sur ce qui s’est passé en 1899, selon un article publié en décembre 2021 sur le site du Journal en ligne ‘’Afrique XXI info’’. Ce n’est que quatre (4) ans après que la France réagit à cette requête de réparation de crimes coloniaux, à un moment où ses relations avec le Niger sont marquées par des désaccords sans précédent consécutifs au coup d’Etat militaire du 26 juillet 2023.
La barbarie coloniale sous tous les projecteurs, plus d’un siècle après
‘’ The Guardian’’ rapporte qu’en 1899, des officiers français dirigés par les capitaines Paul Voulet et Julien Chanoine ont mené une « marche des tirailleurs » à travers des communautés situées sur le territoire de l’actuel Niger. L’armée française aurait tué plusieurs milliers de civils, pillé les réserves des Nigériens et semé la terreur parmi la population. Dans le seul village de Birni N’Konni, région de Tahoua, environ 400 personnes auraient été massacrées en une journée par les troupes françaises, selon la même source. Dans le film documentaire intitulé ‘’L’Apocalypse Africaine’’ réalisé par Rob Lemkin et Femi Nylander, le sultan de Birni N’Konni affirme que Voulet et ses hommes ont tué entre 7 000 et 15 000 personnes en trois jours.

Aussi, dans une Déclaration écrite en lien avec le rapport de l’expert onusien, Ibro Abdou, Professeur et membre de l’Association des Ressortissant de Birni Konni à Niamey (AntraDev), rapporte que la mission Voulet-Chanoine arrive le 2 mai 1899 au bourg de Birnin N’Konni dont la muraille est protégée par quelques « guerriers » à l’aide de flèches et de pavés. « La demande de la mission (des vaches) à laquelle il a été répondu un don en colas (geste d’amitié dans notre tradition) fut considéré comme un geste d’hostilité par la mission, qui ouvrit alors la muraille de Konni à coup de canon », a déploré Ibro Abdou.
« On jeta les cadavres pêle-mêle dans les fossés, avant de les recouvrir de terre. Sept ou huit mille, on ne savait plus très bien… Le 15 mai, quatre corvées détruisirent toutes les cases et les magasins à mil … Le 23 mai, … », indique un extrait du récit du Sergent-Major Célestin Laury, un officier français de la mission Voulet et Chanoine, cité dans la Déclaration du Professeur Ibro Abdou. « Le sergent major Laury fera mettre le feu aux cases et aux magasins », ajoute la Déclaration. Selon le document, quand la mission quitta Birni n’Koni, le 24 mai 1899, cette ville que le sergent Laury décrivait comme suit : «.. l’intérieur ressemblait à une taupinière, avec des rues couvertes, des maisons fraîches et propres construites autour de patios, avec des logements pour les femmes, des bains, des serviteurs, des écuries, des greniers pleins de bonnes choses… Les boutiques regorgeaient de marchandises et de tant de monde qu’on ne savait plus qu’en faire. » a cessé d’exister !!

Par ailleurs, plusieurs autres pays, notamment le Sénégal, l’Algérie, la République Centrafricaine, le Mali, le Vietnam et le Cambodge réclament à la France la reconnaissance des crimes coloniaux ainsi que la réparation de ces crimes. Les réclamations sont essentiellement axées sur les compensations financières pour les dommages subis, ainsi que les restitutions de biens culturels pillés.
Boubacar Hamani LONTO
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