Partenariat Niger-UNICEF : Une convergence d’Approches pour changer la tendance des décès maternels et infantiles dans la région de Maradi

Le Niger est l’un des pays qui ont un taux élevé de décès maternel et infantile, avec une prévalence en milieu rural en raison de l’irrégularité aux consultations prénatales et post-natales, des accouchements à domicile, de l’analphabétisme et de la précarité de la situation socioéconomique, entre autres. Cette préoccupation majeure a conduit le Ministère de la Santé Publique à organiser en novembre 2024, un Forum National sur le décès maternel et périnatal pour identifier les goulots d’étranglement et déterminer des solutions durables. A cette occasion, les décideurs politiques, les leaders communautaires et les partenaires du Niger ont pris des engagements visant à faire face à cette urgence nationale de santé publique. Grace au financement du Ministère Fédéral Allemand de la Coopération économique et du Développement (BMZ) dans le cadre du Projet ‘’Renforcement de la Résilience au Sahel’’, le Fonds des Nations Unies pour l’Enfance (UNICEF) appui au niveau de la région de Maradi, plusieurs Approches mis en place par le gouvernement nigérien pour lutter efficacement contre le décès maternel et infantile.  

La PSIB, un espoir de survie pour les nouveau-nés atteints infections bactériennes potentiellement sévères     

Parmi ces Approches déployées dans la région de Maradi dans le cadre de la lutte contre le décès maternel et infantile, figure la PSIB (Possible Serious Bacterial Infection) qui se traduit par la prise en charge des infections bactériennes potentiellement sévères chez les nouveau-nés de 0 à 59 jours lorsque le transfert vers l’hôpital est impossible. Selon le Point focal de l’Approche PSBI de la région de Maradi, Dr Manzo Zaneidou, cette Approche a été initiée dans la région en 2018 à partir des Districts Sanitaires de Madarounfa, Guidanroumji, Dakoro et Mayahi. En 2019, elle s’est étendue au District Sanitaire de Tessaoua. En 2022, l’Approche PSIB est élargie aux Districts Sanitaires de Bermo, Aguié et Gazawa.  

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Le Point focal de l’Approche PSBI de la région de Maradi, Dr Manzo Zaneidou

« Le District sanitaire de Maradi ville a aussi bénéficié de la formation sur cette Approche, mais on n’y a pas encore commencé la mise en œuvre. Dans chaque District Sanitaire concerné, tous les agents de prise en charge sont formés et suivis dans le cadre de cette Approche », a affirmé Dr Manzo Zaneidou.  « Grace à l’appui de l’UNICEF, nous organisons régulièrement des réunions de coordination, et les centres de santé sont régulièrement approvisionnés en intrants de prise en charge. Nous analysons régulièrement nos indicateurs, la dernière fois, nous avons constaté qu’il y a une diminution du taux de décès dans les 24 premières heures, surtout chez les enfants », a-t-il ajouté.

S’exprimant également sur l’Approche PSIB, le responsable du CSI de Kornaka, Sawani Akazama, a d’abord rappelé que son aire de santé couvre 58.264 habitants dont 3.064 femmes en âge de procréer et environ 11.760 enfants de 0 à 11 mois. Il a ensuite souligné qu’avant l’appui de l’UNICEF dans le cadre de cette Approche, ils étaient obligés de référer les enfants qui ont une possibilité d’infection bactériennes sévères car n’ayant pas la possibilité de les prendre en charge. « Aujourd’hui, grâce à cet appui, nous arrivons à les prendre en charge avec des molécule telles que les gentamicines, les ampicillines, les amoxicillines 250 mg dispersibles », a témoigné Sawani Akazama ajoutant qu’avant cette prise en charge, beaucoup d’enfants de 0 à 59 jours ayant des infections bactériennes graves et qui sont référés, meurent en cours de routes. « Avec la prise en charge surplace au CSI, ces enfants survivent, y compris ceux qui ont de 0 à 6 jours. Nous prenons en charge également beaucoup d’enfants de 7 à 59 mois qui en arrivent à guérir de leurs infections. Toutes choses qui n’étaient pas possible avant cet appui du partenaire », a expliqué le responsable du CSI de Kornaka.  « Pour l’année 2025 en cours, nous avons pris en charge environ 400 enfants », a-t-il renseigné.

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Le responsable du CSI de Kornaka, Sawani Akazama

Après avoir relevé qu’au niveau communautaire, il y a des relais formés avec l’appui de l’UNICEF qui détectent et leur réfèrent les enfants atteints d’infections bactériennes, Sawani Akazama a lancé un appel à l’endroit du partenaire pour appuyer davantage leur centre de santé en intrants, supports et recyclage régulier des agents qui prennent en charge les infections bactériennes potentiellement sévères chez les enfants.

Des résultats probants au niveau communautaire

Dans le cadre de l’introduction de l’Approche PSBI au niveau communautaire, en 2024 et 2025, des relais communautaires ont été formés sur plusieurs thématiques dont les visites à domiciles des femmes enceintes jusqu’à l’accouchement ; les signes généraux de danger de la grossesse ; les maladies fébriles chez le nouveau-né, les prématurés ; les soins à administrer après accouchement.

Ainsi, au village de Siminti, dans la commune rurale de Kornaka, Siradji Mahaman, le relai ICCM qui depuis 2017 prend en charge les formes simples du paludisme, diarrhée et pneumonie chez les enfants de deux (2) mois à moins de cinq (5) ans, accompagne également les ménages en matière de soins aux femmes enceintes et aux nouveau-nés ainsi que la reconnaissance des signes de danger qui nécessitent dans l’immédiat de référencements vers les centres de santé. Aussi, Siradji Mahaman sensibilise les femmes enceintes et les mères des jeunes enfants sur la pertinence des consultations prénatales et néonatales, ainsi que l’accouchement assisté par un personnel qualifié.

« Nous ne sommes pas autorisés à prendre en charge les enfants de moins de deux mois, si nous détectons une pathologie chez un enfant de cette tranche d’âge, nous le référons au CSI. Par mois je réfère au CSI de Kornaka de zéro (0) à trois (3) enfants de moins de deux (2) mois et plus de dix (10) enfants de deux (2) mois à moins de cinq (5) ans dont la maladie dépasse ma compétence », a confié le relais ICCM du village de Siminti, se réjouissant d’être au service de sa communauté.

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Le relais communautaire de Siminti, Siradji Mahaman, lors d’une visite à domicile

Pour la sensibilisation et le suivi, le relais communautaire de Siminti effectue les visites à domicile chez les femmes concernées, une fois par semaine. Zouweira Issoufou, la mère du nourrisson Khalifa bénéficie de cette acticité du relais, depuis qu’elle était enceinte et même après avoir accouché. Arrivée au domicile de Zouweira, Siradji Mahamane, après les salutations d’usage, a posé quelques questions à la jeune mère, avant d’examiner le nourrisson. La dame bénéficiaire de ce programme de santé communautaire, est visiblement contente de cette visite à domicile qui la situe sur l’état de santé de son enfant. « Je suis venu voir son enfant et j’ai constaté que le bébé se porte bien », a annoncé Siradji Mahamane.

Selon Zouweira Issoufou, le relais communautaire incite constamment les femmes à être régulières aux consultations prénatales et postnatales. « Il fait le suivi de l’état de santé de nos enfants et nous indique même les différents signes qui annoncent les problèmes de santé chez les nourrissons, notamment le refus de téter, la fièvre, les taches au niveau du nombril », a témoigné la mère du jeune Khalifa. « Grace à ses séances de sensibilisation, j’ai appris beaucoup de choses qui me permettent de contrôler l’état de santé de mon enfant et de l’amener à temps au centre de santé en cas de problème de santé », a -t-elle souligné.

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Zouweira Issoufou et son enfant Khalifa

Pour sa part, Boukari Karo, Chef de village de Siminti, a fait savoir qu’avant les activités de sensibilisation menées par le relais, sa communauté négligeait beaucoup les consultations prénatales et postnatales, et il y avait régulièrement des accouchements à domicile. « Les femmes en souffraient beaucoup, certaines en mourraient, et beaucoup d’enfants avaient également perdu la vie à cause du manque du suivi médical des grossesses, des accouchements et de l’état de santé des nourrissons », a regretté le Chef de village de Siminti. « La sensibilisation a fait en sorte que les habitants de ce village connaissent l’importance des différentes consultations, et la mortalité maternelle et infantile a fortement diminué », a-t-il poursuivi. « De mon côté, à plusieurs occasions, notamment lors des cérémonies ou autres rassemblements, j’exhorte les chefs de famille et les femmes à suivre les consignes du relais pour éviter les problèmes de santé chez la femme enceinte, la mère et l’enfant », a annoncé Boukari Karo.

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Boukari Karo, Chef de village de Siminti

  

Conjuguer des efforts communautaires en faveur des pratiques préventives des décès maternels et infantile

Selon Dr Issoufou Yahaya, Médecin-Chef du District Sanitaire de Dakoro, dans cette aire de santé couvrant 1.207.307 personnes, avec 34 CSI, 103 cases de santé et un bloc opératoire, la situation de la santé maternelle et infantile s’est améliorée grâce à l’important appui apporté par le partenaire dans la mise en œuvre d’un programme de sensibilisation sur la santé maternelle et infantile, un programme initié dans le cadre des engagements pris au Forum National sur le décès maternel et périnatal. « Grace à cet appui, nous avons rénové cette année. Dans la commune rurale de Kornaka regroupant dix (10) CSI concernés par ce programme, nous avons commencé par un plaidoyer qui a réuni autour du Chef de canton, une quarantaine de personnes composée des différents acteurs notamment les chefs de villages, les chefs de quartiers et les adolescentes. », a indiqué Dr Issoufou Yahaya.

« Après ce plaidoyer, trois (3) focus groupes regroupant les jeunes adolescentes, les groupe de soutien ANJE (Alimentation du Nourrisson et du Jeune Enfant), ont été organisés au niveau de trois (3) CSI différents. Nous avons ensuite organisé des formations pour ces différents acteurs, une quarantaine de jeunes filles qui sont actuellement sur le terrain pour continuer la sensibilisation sur la santé maternelle et infantile », a-t-il poursuivi. Selon le Médecin-Chef du District Sanitaire de Dakoro, la sensibilisation est axée sur la lutte contre le mariage des enfants, les consultations prénatales, les accouchements dans les centres de santé, la vaccination des enfants, entre autres. Les relais communautaires formés par l’UNICEF sont également mis à contribution dans la mise en œuvre de ce programme de sensibilisation, et les Chefs CSI assurent le suivi de cette activité de sensibilisation. Après trois (3) mois de mise en œuvre de ce programme, les différents acteurs se réuniront pour faire le point.

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Dr Issoufou Yahaya, Médecin-Chef du District Sanitaire de Dakoro

« Les données du suivi indiquent que la sensibilisation se passe bien sur le terrain et nous espérons que cela contribuera à réduire la mortalité maternelle et infantile. Nous espérons également que cette initiative louable s’étendra à tous les 35 CSI du District sanitaire de Dakoro », a souhaité Dr Issoufou Yahaya.  

De son côté, Harouna Seydou, responsable du CSI de Alforma couvrant 25 villages dans le District Sanitaire de Dakoro, a indiqué qu’auparavant, les femmes fréquentaient peu le centre de santé pour les consultations prénatales, les accouchements assistés et les soins curatifs, à cause de la méconnaissance des dangers liés à la grossesse et aux accouchements à domicile ; les décès maternels et infantiles étaient très fréquents. « Mais, avec la sensibilisation mise en œuvre par les groupes focus et les mamans modèles, il y a eu une évolution significative des indicateurs de consultations au niveau de notre aire de santé », a témoigné le responsable du CSI de Alforma.

De même, selon Harouna Seydou, les jeunes filles impliquées dans la lutte pour la réduction du décès maternel et infantile jouent un rôle très important auprès de leurs camarades filles contre le mariage précoce et sensibilisent les mamans sur les consultations prénatales, l’accouchement assisté et les consultations postnatales. « Elles ont fortement contribué à l’amélioration de la situation », a-t-il affirmé.

En effet, « au premier trimestre de l’année 2025, nous avons enregistré 194 femmes pour les CPN1, c’est-à-dire les femmes qui sont vues pour la première fois en consultation prénatale. Au deuxième trimestre, nous avons enregistré jusqu’à 200 femmes en CPN1. Pour ce qui est des femmes qui ont fait 4 CPN et plus, en 2025, nous en avons enregistré 161 au premier trimestre et 177 au deuxième trimestre », a indiqué le responsable du CSI de Alforma, à titre illustratif.  Pour Harouna Seydou, la sensibilisation et les engagements pris par les différentes couches sociales ont permis de réduire les décès maternel et infantile dans cette aire de santé.

Le DHI-S2, un outil de surveillance nutritionnelle et sanitaire qui contribue à la réduction des décès infantiles 

Le Médecin-Chef du District Sanitaire de Dakoro, Dr Issoufou Yahaya, a renseigné que le DHI-S2 permet de suivre de bout en bout les indicateurs de vaccination et de nutrition, et que pratiquement tous les indicateurs sont suivis dans le DHIS-2 alimenté à partir des données sur papiers hardwares produites au niveau des différents centres de santé et des relais communautaires. Grace à l’appui de l’UNICEF, les différents acteurs, notamment les chefs CSI du public et du privé se retrouvent mensuellement pour échanger sur les données du DHIS-2 pour la cohérence des différents supports. Cette rencontre constitue également un cadre de formation et d’initiation à l’outil informatique pour les agents de santé.

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Le Médecin-Chef du District Sanitaire de Dakoro, Dr Issoufou Yahaya

« La cohérence des supports est très importante car, de nos jours, en termes de données du District Sanitaire, tout ce qui sort en dehors du DHIS-2, n’est pas considérée comme une donnée fiable », a souligné le Médecin-Chef du District Sanitaire de Dakoro. « A partir du logiciel DHI-S2, de n’importe où, le Ministre peut directement consulter les données du District Sanitaire de Dakoro. Le logiciel DHI-S2 est accessible pour tout le monde, même pour ce qui sont en dehors du pays, pourvu qu’on ait le code », a-t-il précisé.   

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Affiches de données au District Sanitaire de Dakoro

Le Responsable du CSI de Kornaka, Sawani Akazama, a, de son côté, expliqué que les rapports qu’ils produisent chaque mois sur les papiers hardwares sont enregistrés dans leur plateforme DHI-S2, grâce à l’appui du partenaire. « Les rapports de toutes nos activités, notamment la vaccination, le curatif, la prise en charge de la malnutrition, sont tous centralisés sur le DHI-S2. Auparavant, nous ne produisions que les rapports hardwares pour déposer », a affirmé Sawani Akazama. « Maintenant, avec le DHI-S2, si un partenaire ou même le Ministère en charge de la santé a besoin de voir ce que nous produisons au CSI de Kornaka, il peut ouvrir surplace la plateforme de Kornaka et voir les données que nous produisons. Cette plateforme nous donne également la possibilité de consulter nos archives à volonté », a-t-il ajouté.

Toutefois, la mauvaise qualité de la connexion internet est parfois une entrave pour les activités en lien avec le DHI-S2, selon le responsable du CSI de Kornaka. Il a ainsi plaidé auprès des partenaires pour un appui dans ce domaine aussi, afin de mener les activités avec plus d’aisance et d’efficacité.

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Affiches de données au CSI de Kornaka

Boubacar Hamani LONTO

Envoyé Spécial                          

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